Yan Dehui n’a que 13 ans lorsqu’il débute son apprentissage de sculpteur tout en poursuivant son cursus scolaire, sans se douter qu’il vient de s’embarquer dans un voyage artistique extraordinaire qui va le conduire à l’autre bout du monde. Il fait ses premières armes auprès de Zhu Zichang, spécialiste de la sculpture du buis et maître reconnu dans la province du Zhejiang dont le jeune garçon est originaire. Cinq années d’études lui suffisent pour maîtriser parfaitement l’art de la taille directe et à 18 ans il est déjà un sculpteur accompli dans ce domaine. Ainsi, dès son plus jeune âge, Yan Dehui a été profondément influencé par l’art traditionnel chinois auquel il aimera retourner durant la période de maturité. Mais la première partie du XXe siècle voit de grands changements s’opérer dans le pays. L’heure est à la modernisation, qu’elle soit industrielle, scientifique ou culturelle et cette modernisation passe par l’apport technique de l’Occident. Plusieurs académies ont déjà été créées sur le modèle des Beaux-Arts de Paris, dont la SAFA (Shanghai Academy of Fine Arts) dirigée par le Peintre Liu Haisu. C’est là que Yan Dehui découvre l’art occidental, caractérisé par l’étude de l’anatomie d’après modèle vivant, en rupture totale avec la tradition chinoise. Il y apprend de nouvelles techniques, essentiellement le modelage, le moulage et la patine. Après avoir obtenu son diplôme il devient l’assistant de son professeur et collabore à la réalisation de ses œuvres avant de rejoindre la SAFA en tant que professeur de sculpture. Sa pratique de l’enseignement, qui lui a permis de partager ses connaissances et de transmettre sa passion pour la sculpture, a renforcé son engagement pour les arts et a élargi son influence au sein de la communauté artistique. Sa formation initiale en Chine lui a permis d’acquérir des compétences essentielles ainsi qu’une perspective unique qui ont enrichi son travail par la suite et jeté les bases de ses projets futurs.

Sa participation à la première Exposition Nationale d’Art ainsi que sa production personnelle, tant publique que privée, le fait reconnaître dans le milieu artistique chinois. Sa carrière est lancée. Mais il a encore soif d’apprendre et veut élargir son horizon. Entre les années 1920 et 1940, près de 150 artistes vont répondre à l’appel du gouvernement qui les incite à aller chercher la modernité à sa source. Yan Dehui décide d’en faire partie et fait le choix de l’Europe, où il s’est immergé dans l’environnement artistique vibrant et diversifié de la France. Son séjour à Paris, épicentre de la scène artistique mondiale, a été marqué par une période de profonde révélation et de progression. En France, Yan Dehui a étudié auprès d’éminents sculpteurs, faisant sienne la tradition académique occidentale tout en perfectionnant sa technique. La richesse de l’atmosphère artistique de Paris, faite d’innovation et de créativité, a constitué le cadre idéal pour son développement. Il a passé d’innombrables heures dans des musées et dans des ateliers qui lui ont permis d’expérimenter différents styles et matériaux, affinant progressivement son art. Au cours de son séjour en Europe, Yan Dehui a noué des amitiés durables avec des artistes, des scientifiques et des intellectuels, créant ainsi un réseau de soutien et d’inspiration qui a joué un rôle crucial dans son évolution artistique. Ces relations ont enrichi sa vie personnelle et professionnelle, lui offrant de nouvelles perspectives et des possibilités de collaboration qui ont alimenté sa créativité. La capacité unique de Yan Dehui à synthétiser ces diverses influences a attiré l’attention sur son indéniable savoir-faire et son style particulier, qui le conduit de temps à autre à fusionner l’Orient et l’Occident. Cette période de sa vie se caractérise par une intense activité créatrice, qui l’amène à participer à de nombreuses expositions lors de salons prestigieux.

Au fur et à mesure qu’il évolue en tant qu’artiste, Yan Dehui s’affirme sur la scène artistique française grâce à sa capacité à capturer l’essence de ses sujets, insufflant à ses œuvres un sentiment de vitalité et d’émotion. Ses sculptures, qu’elles représentent des thèmes classiques ou des sujets contemporains, reflètent une profonde compréhension des traditions artistiques et des savoir-faire de l’époque. La famille a joué un rôle essentiel dans le parcours de Yan Dehui qui se marie avec une Française et fonde une famille. Mais un déménagement en province dans les années 1950 marque un nouveau chapitre de sa vie, le coupant du cercle artistique parisien. Il continue cependant à exposer épisodiquement, à réaliser des commandes de bustes tout en revenant à la sculpture du buis. Le voyage de Yan Dehui en Europe n’a pas été un simple déplacement géographique, mais une profonde transformation personnelle et professionnelle. Transcendant les frontières culturelles et artistiques, il s’est imposé comme un artiste exigeant dont les œuvres suscitent un nouvel intérêt en ce début du XXIe siècle, tant en France qu’en Chine. Artiste singulier dans le monde de l’art, Yan Dehui laisse derrière lui un héritage de beauté, d’innovation et d’attrait intemporel, propre à redonner à l’art figuratif ses lettres de noblesse. Son œuvre constitue un pont entre les cultures, un symbole d’excellence artistique et une source d’inspiration pour les générations à venir. Son histoire est une célébration de la capacité de l’esprit humain à grandir, à s’adapter et à créer, nourrie par l’affection et le soutien de sa famille et de ses amis. Son héritage témoigne du pouvoir de l’exploration artistique et de l’impact durable des échanges interculturels.